UN MIRACLE NOMMÉ RETROUVAILLES

… Essoufflé et encore surpris, Alex se change rapidement et emporte sa torche. Un coup d’œil furtif sur le lit, Ingrid dort. Il dévale l’escalier trois marches à la fois et de son air d’écolier à longue frange atterrit devant la porte en se cognant le pied contre la console en bois. Non, il vaut mieux sortir par la cuisine, la grande porte de l’entrée principale risque de réveiller Ingrid avec son bruit de serrure.

Sortant par la porte de derrière qui donne sur le jardin, il s’arrête net puis revient sur ses pas. Maudit… je dois emporter la clé de la cave. Il fronce les sourcils, il a mal à la poitrine et son cœur bat à faire rompre ses artères. Flora ! À la cave ? Jamais depuis Gardénia il n’a ressenti ainsi danser son cœur, jamais !

La brise est douce, humide, mais agréable. Serait-elle en robe fleurie, comme ma Gardy ? pense-t-il. Flora et Gardy se confondent subitement et stupidement dans sa tête, dans ses émotions… deux femmes en une seule… impossible ! Je suis sûrement malade.

Notre cave ? Cette Flora aurait-elle entendu parler de la cave au village ! Mais non, je ne la laisserai jamais y poser pied, jamais ! Cette cave est la nôtre, Gardy ! se dit-il en dévalant les escaliers en pierre.

Alex ne sait plus quoi penser, Flora est une amie. Je l’aime bien, mais pas comme toi, Gardy. Jamais. Toi, tu es mon âme sœur. Flora est une dame si gentille, douce, compréhensive, respectueuse et respectable, comme toi, ma Gardy, mais toi, où es-tu ? Montre-toi pour une fois !

Traversant le jardin, il ressent le parfum du gardénia et commence à s’enivrer. Quelque chose au plus profond de son cœur lui dit : « elle est là » ! Il avance à pas de loups. Apercevant une ouverture entre les gros battants en bois de la porte de la cave, il se redresse brusquement, pétrifié :

– Ouf, les ouvriers auraient-ils oublié de bien fermer la porte ? marmonne-t-il en s’approchant.

Une faible lumière émane de l’intérieur de la cave, Alex est de plus en plus inquiet.

Non. J’avais gardé ma clé, Alex !

Alexandre sursaute : une voix à l’intérieur ? Flora ?

Il s’approche, les jambes chancelantes. Son cœur reconnaît la voix, si unique, rauque, douce. Son âme vacille. Son cœur ressent la présence de Gardénia mais ses oreilles refusent de le croire. L’obscurité de la cave est immense par cette soirée d’automne,

– Pardon ? crie-t-il

Flora et Gardy se mêlent encore dans sa tête et dans son cœur… la pénombre et la brume de la cave ne l’aidant pas, il avance lentement,

– J’avais gardé mon ancienne clé, Alex ! répète la femme en haussant la voix

Alex n’a plus de force aux genoux, ses mollets manquent de s’effondrer : Gardy, son timbre de voix, son accent, nulle autre ! Il le sait, il le reconnaît ! Son sang gèle dans ses veines, il tente de s’approcher dans la pénombre, mais ses jambes tremblent, elles n’arrivent plus à supporter le poids de son corps.

(Le gardénia de la cave, 2017)